L'Allemagne, locomotive économique de l'Europe, dans une situation «dramatique»

L'Allemagne, locomotive économique de l'Europe, dans une situation «dramatique»

RFI
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La situation de l'Allemagne est « dramatique ». Ces mots ont été prononcés il y a quelques jours par le ministre allemand de l'Économie. Les nouvelles prévisions du gouvernement présentées ce 21 février viennent confirmer un enlisement de la première économie européenne. Berlin a baissé son estimation de croissance du PIB à 0,2% pour l'année en cours contre 1,3% prévu auparavant. Une baisse de la croissance qui a débuté l'an passé.

Il y a eu un premier signe avant-coureur avec une baisse du PIB de 0,3% en 2023. En fin d'année, Le gouvernement allemand espérait encore un retour de la croissance en 2024 : espoir douché par ces nouvelles prévisions. C'est un énorme coup dur, d'autant que les perspectives ne sont pas plus optimistes pour les années à venir, au cours desquels la croissance devrait stagner en moyenne à 0,5% si aucune mesure drastique n'est prise pour redresser la barre. 

Le pays n'a jamais retrouvé son niveau de croissance d'avant Covid. Et si l'on compare la performance de l'Allemagne par rapport aux autres grandes puissances ces dernières années, elle est nettement inférieure. Depuis cinq ans, sa croissance stagne et atteint 0,7% cumulé alors que pour l'ensemble des pays européens, elle a pu grimper de 4% depuis 2019, selon le bureau allemand des statistiques. 

Perte de vitesse

Pour expliquer cette situation, il y a la question de l'industrie allemande qui souffre depuis deux ans en raison de factures énergétiques trop élevées. Depuis le début de la guerre en Ukraine, et la fin des livraisons de gaz russe, l'industrie allemande voit ses charges exploser. L'industrie qui assure environ un quart de la création de richesse outre-Rhin est aujourd'hui en grave perte de vitesse : hors construction, la production de produits manufacturés s’est repliée de 2% en 2023. La chimie et la sidérurgie sont très touchées : leur production reste inférieure de presque 20% par rapport à leur niveau de 2021, laissant augurer des pertes d’emplois durables sur ces secteurs traditionnels du « made in Germany ». Des groupes comme BASF, Bayer et Covestro ont d'ailleurs signé une tribune cette semaine avec une soixantaine de groupes industriels pour demander des mesures de soutien aux dirigeants de l'Union européenne.

À cela s’ajoute la dégradation des conditions de financement liée à des taux d’intérêt élevés, qui freine l'investissement. Le recul de la consommation des ménages en raison de l'inflation a fait le reste. Malgré un chômage faible, le manque de confiance en l'avenir est flagrant. Seule lueur d'espoir : les exportations, autre pilier de l'économie allemande, qui repartent légèrement à la hausse.

Investir

Les experts s'accordent à dire que l'Allemagne a besoin d'investir pour relancer son économie. Il existe une règle qui l'empêche de le faire, c'est le dispositif de « frein à la dette » qui permet au pays de limiter ses dépenses, car le déficit budgétaire annuel de l’État ne doit pas dépasser 0,35% du produit intérieur brut. Ce qui n'est pas forcément de bon augure : l’Allemagne a en effet besoin de procéder à des investissements supplémentaires pour moderniser son économie. Et le pays a accumulé d’inquiétants retards en matière d’infrastructures routières et ferroviaires, mais aussi dans d'autres domaines tels que la transition numérique.

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